Revue

Roland

Barthes





n°1 - Jeunes chercheurs > juin 2014




Juliana Bratfisch

« L’envie de l’intermezzo » : une métaphore pour l’écriture barthésienne


Barthes avait envie de l’intermezzo. Issue de «Rasch», l’expression envie de l’intermezzo apparaît originellement liée à Schumann. Selon Barthes, la dynamique de la production schumanienne empêche le discours de prendre, de se développer, parce qu’elle est d’ordre pulsionnel : elle n’est qu’une suite continuelle d’intermezzi, où « ce qui interrompt est à son tour interrompu[1] ». Compris en un sens physiologique, comme le suggère l’article, mais aussi au sens plus conscient du désir, Barthes avait en effet envie de l’intermezzo : il était fasciné par sa dynamique du court-circuit, par le geste de coupure qu’il croyait capable de mettre en crise les discours dominants. Dans son œuvre, la dialectique entre l’usage collectif du code et son usage singulier a toujours été présente[2] : c’est la tentative de préserver son rythme propre des rythmes dictés de l’extérieur pour échapper à la bêtise que représentent à la fois l’hystérie de l’individu et l’arrogance de l’universel. Parfois, le conflit entre ces deux pôles s’exacerbe, et l’on retrouve alors des provocations du type « la langue est fasciste[3] » ; mais dans le cas de la musique, cette dialectique a été plutôt heureuse et productive.

Les références musicales sont omniprésentes dans l’œuvre de Barthes, mais c’est surtout dans les années 1970-1980 qu’elles sont fortement investies : du premier texte entièrement consacré à la musique, le texte sur Beethoven, « Musica Practica », jusqu’à son dernier cours au Collège de France, La Préparation du Roman, où la musique est sans aucun doute un discours sous-jacent. Cette décennie est surtout connue pour son glissement vers le romanesque, mais elle constitue aussi un glissement vers la musique. Il suffit de jeter un coup d’œil à la fin du tome cinq de ses Œuvres Complètes ou d’écouter les émissions radiophoniques, pour retrouver les nombreuses références écrites et parlées de cette époque à la musique romantique, à la voix, au piano et vérifier que Barthes porte un intérêt vif et croissant pour la musique. À regarder de près ces références, on voit même que la musique constitue plus qu’un simple intérêt thématique, et constitue un modèle pour penser l’écriture : si dans Roland Barthes par Roland Barthes l’idéal du fragment était déjà « une haute condensation de musique[4] », dans une séance de La Préparation du Roman qui envisage un autre modèle d’emploi du temps de l’écrivain, contre le modèle bureaucratique qui minait Kafka, Barthes propose de « penser l’Écriture en termes de musique[5] ». Une question s’impose suite à cette constatation : comment la musique peut-elle servir à comprendre l’écriture barthésienne, cette écriture plutôt fragmentaire, mais qui exprime son ultime désir comme désir d’ « écrire une œuvre en Ut Majeur »? On essaiera ici de répondre à cette question, du moins on tentera de proposer quelques hypothèses, en vue d’interroger le rapport entre musique et écriture chez Barthes.

Et qu’est-ce que cela signifie que de penser l’écriture en termes de musique ou en termes musicaux ? Est-ce penser aux procédures de construction d’une phrase d’un point de vue rythmique, par exemple ? Est-ce énumérer les figures de rupture rhétorique présentes dans le texte écrit et les comparer aux figures équivalentes dans le texte musical ? Est-ce encore penser à la polyphonie des phrases ? Quand Barthes parle de musique, il invente des concepts, des figures liées au corps (des «  sommatèmes » ) pour essayer de dire ce que les figures musicales, mais aussi la science, échouent toujours à dire. Plus qu’une thématique ou qu’une structure intelligible, chez Barthes la musique relève donc – comme l’amour – d’un défi : il s'agit de plonger dans l’indicible qui caractérise tout affect. Et, même si l'affect relève de l'innommable, on n'arrête pas de créer des images pour le nommer.  C’est pour cela qu’on ne considérera pas ici la musique de l’écriture barthésienne à travers la musicalité de sa phrase, on ne la considèrera pas non plus en regard du beau melos qu’incarnent les enregistrements de sa voix, mais on comprendra davantage la musique en tant qu’image, en tant que métaphore productive pour penser son écriture.



L’interprétation


Une première approche possible a trait à la question de l’interprétation. Le mot appartient au moins à trois domaines auxquels Barthes s’intéresse : la critique littéraire, le théâtre et, évidemment, la musique. En ce qui concerne l’interprétation en termes de critique littéraire on touche à ce que Barthes réfute dans toute son œuvre. Je ne parle pas de l’interprétation dans le sens « perspectiviste » que Nietzsche donne à ce mot – ce n’est pas ce « pour moi » dont Barthes a fait une sorte de refrain dans l’introduction de ses séminaires à partir du Lexique de l’auteur[7] –, j’évoque l’activité herméneutique qui vise à éclaircir les œuvres littéraires. L’idée de l’interprétation se fonde sur un privilège du contenu, comme s’il y avait une vérité, une origine préexistante qui devait être déchiffrée. Le même mot, appliqué aux deux autres domaines, acquiert une nouvelle épaisseur. Au théâtre, interpréter c’est jouer un rôle, c’est porter un masque. En musique, interpréter c’est tout simplement jouer une partition. Il y a deux façons de faire : soit on apprend par cœur le morceau et on joue ; soit on lit la partition. Lire la partition, finalement, c’est faire coïncider la lecture d’une œuvre et son écriture – ou sa réécriture – par l’intermède d’un instrument musical. Barthes, pianiste amateur, n’a pas cessé d’affirmer qu’il ne savait aucun morceau par cœur, qu’il lisait la partition[8] . C’est dans ce dernier sens que l’interprétation en musique peut être comprise comme une première métaphore de l’écriture barthésienne : il pensait l’écriture de la même manière qu'il jouait du piano, l’écriture pour lui est aussi la coïncidence entre la lecture faite et sa réécriture.

Une distinction entre deux régimes de lecture a été établie dans Le Plaisir du texte : une lecture qui saute, qui va droit aux articulations du discours (la lecture propre aux textes classiques) et une lecture qui broute, qui colle au texte, intéressée aux coups du langage (la lecture propre aux textes modernes). Mais, au-delà de la distinction entre ces deux régimes, il y a un mouvement général de la lecture chez Barthes qui consiste à « lire en levant la tête[9]  » pour aller vers un autre texte, toujours en devenir, déclenché par l’écoute et les associations qui émanent du texte premier, du texte lu[10]. Lire à la table de travail, comme au piano, c’est se livrer à une activité de production.

C’est n’est pas un hasard si Gide, Nietzsche, Michaux, Quignard, et aussi Barthes, sont, dans leur écriture, des explorateurs moins d’une forme que d’une formation – ou plutôt d’une déformation. Tous, écrivains pianistes, connaissent le plaisir de l’évasion temporelle, l’expérience de la solitude, le risque et l’inachèvement de la musique et de l’écriture, activités qui sont de plus en plus marginales dans notre société. Dans « Aimer Schumann » Barthes affirme que le manque d’intérêt pour le compositeur romantique est d’abord d’ordre historique : ce qui a changé, c’est la façon dont on écoute la musique. Au XXème siècle on n’est plus producteur de la musique qu’on écoute. Il ajoute que même les gens intéressés à la musique classique préfèrent écouter les musiciens du romantisme lourd, comme par exemple Mahler. Schumann est délaissé, à cause de son piano trop intime en regard de ce que le monde est devenu : un monde où tout est devenu public et qui réprime l’intimité (surtout cette intimité mélancolique propre à Schumann). Selon lui, le passage de l’écoute privée à l’écoute publique se caractérise par la virtuosité « un peu glacée » des enregistrements sur disque et les coquetteries des concerts.

La musique schumannienne, selon Barthes, « va dans le corps, dans les muscles, par les coups de son rythme, et comme dans les viscères, par la volupté de son melos […]  le morceau n’a été écrit que pour une personne, celle qui le joue : « le vrai pianiste schumannien, c’est moi[11] ». Cette maxime finale ne doit pas être entendue en un sens égotiste affirmant : « le vrai pianiste schumannien, c’est moi ». Barthes vise la jouissance ressentie et non la technique appliquée : jouer la musique de Schumann, pour Barthes, c’est aussi jouir de son corps. Schumann est un peu l’intimité de Barthes, sa solitude, et affirmer Schumann dans les années 1970 c'est une manière d’affirmer son corps, son écart vis-à-vis de la collectivité et des musiques de masse écoutées déjà un peu partout dans les grandes villes. Barthes joue Schumann plus qu’il ne l’écoute, en se mettant du côté de la production, et non du produit.

On sait aussi que le Barthes pianiste aimait faire des sauts dans la partition, jouer des bribes, se concentrer sur quelques passages. Et quand on commence un peu à étudier Schumann, on comprend tout de suite que Schumann est très difficile à jouer et qu’il faut le travailler en détail. Les doigts s’écartent beaucoup sur le clavier, il y a la main gauche et la main droite qui parfois ne communiquent pas – et ce n’est pas seulement du point de vue de la composition, de la technique de jeu, mais aussi du point de vue du personnage : car pour jouer Schumann, il faut changer de rôle, changer de couleur (c’est tout le temps « Florestan » qui interrompt « Eusebius » et vice-versa). Mais, quand j’indique le discontinu de la pratique pianistique de Barthes, ou quand je rapproche son discours de mon expérience, je veux simplement comprendre ce qu’il veut dire et essayer de signaler sa posture en tant qu’écrivain : dans La Préparation du Roman, quand Barthes affirme qu’il faut travailler comme un pianiste, il demande ensuite aux auditeurs : « Pourriez-vous apprendre du piano ou du chant sans travailler tous les jours ?[12] », signalant par là le besoin d’une écriture quotidienne et régulière, comme un pianiste travaille ses pièces au piano ou comme un chanteur travaille sa voix, tous les jours, ne fût-ce qu’un peu. D’où l'on peut comprendre encore, tout simplement, que l’écriture barthésienne n’est qu’une production quotidienne qui met en scène à la fois la lecture d’une œuvre et sa réécriture.



Le code et la signifiance


La tonalité, le code de la musique occidentale, est ce qui organise les signifiants musicaux, c’est-à-dire  les notes de la gamme. Elle est grosso modo à la musique ce que la langue est au discours : elle vise à articuler les sons selon une organisation connue et partagée. Mais, à l’inverse de la langue, elle ne possède pas, disons, une nature « fasciste » : il ne s’agit pas d’une syntaxe qui impose une convention grammaticale, étant donné qu’il « n’y a pas de limitation à la multiplicité des sons produits simultanément par un assemblage d’instruments, ni à l’ordre, à la fréquence ou à l’étendue des combinaisons[13] ». C’est la distinction qu’a faite Benveniste dans son article « Sémiologie de la langue », repris par Barthes plusieurs fois, entre le sémiotique et le sémantique. La langue, selon Benveniste, est l’unique système de signes qui s’articule sur ces deux dimensions : le sémiotique, le signe reconnu par association ou par opposition ; et le sémantique, la production de sens engendrée par le discours. Les autres systèmes de signes ont tous une signifiance unidimensionnelle : la musique n’est que sémantique. Voici la spécificité du signe musical, déjà remarquée par Hegel qui souligne que sa particularité tient à ce qu’il ne produit pas d’objets réels[14]. Le signe musical ne représente rien, il n’est pas, comme Barthes l'articule, « le signe d’un signe[15] ». Or, c’est parce qu’en musique il y a la possibilité d’organiser librement les signes sans leur imposer un sens, sans adresser un message, que Barthes s’y intéresse, car elle lui permet ainsi de mieux comprendre « le Texte comme signifiance[16] ».

La signifiance est précisément définie par Barthes comme un concept qui appartient au plan de la production langagière et qui ne se réduit ni à la communication, ni à l’expression ou à la représentation. Au contraire, la signifiance est ce qui fait du texte une production érotique. En musique, la tonalité – comme en écriture, la langue – est ce qui permet de susciter la transgression : « destinée à articuler le corps, non selon ses propres coups (ses propres coupures), mais selon une organisation connue qui ôte au sujet toute possibilité de délirer[17] », la tonalité est aussi une « servante habile » ; elle est à la fois ce qui nous oblige à appartenir aux règles et ce qui accentue la valeur de la transgression. Encore dans « Rasch », Barthes pense à un autre système – qu’il nomme la timbralité – où les coups sont les seuls éléments structuraux du texte musical moderne. Webern et Schumann peuvent être reliés par le « coup » ; c’est ce que Barthes veut établir en pointant la continuité transhistorique de leur énonciation musicale : du premier, il fait un éloge de ses ruptures et accorde une importance primordiale aux silences[18], du deuxième, il souligne la dynamique accentuelle de sa « rupture » et voit en elle une véritable valeur. On revient alors à la distinction faite par Barthes dans Le Plaisir du Texte entre texte classique et texte moderne. Pourtant ce qui permet en musique « toute richesse de coups[19] », ne fonctionne pas forcément aussi facilement en littérature. Barthes savait que si l’on travaille au niveau de la phrase, on doit maintenir la structure syntaxique, et si on veut trouer le discours, comme Flaubert, on ne doit pas « le rendre insensé[20] ». Quand tout est attaqué, quand tout est détruit, le texte risque de se périmer[21]. L’érotique réside dans l’intermittence, dans ce vêtement qui bâille et qui nous montre ce qu’il y a entre un pantalon et une chemise. Il n’y a pas de texte quand on enlève tout : il faut une structure solide, un code pour accentuer son usage singulier, pour accentuer l’imprévisible intermittence des « coups ».



Les intermezzi


Le désir barthésien de « trouer le discours sans le rendre insensé[22] » à travers « la mise en scène d’une apparition-disparition[23] » se fait jour quand on réunit quelques-unes de ses idées sur le fragment[24]. L’écriture fragmentaire est chez lui une « pratique presque originaire[25] », devenant même synonyme d’écriture tout court dans sa fortune critique. Pourtant, même si l'on ne veut pas parler de fragment chez lui, il est indéniable que la rupture intentionnelle du flumen orationis – du flux de discours – est un outil rhétorique, une performance technique qu’il a souvent mis aux fins de se préserver des leurres de l’imaginaire en ce qui concerne l’écriture[26]. Loin des modèles de fragmentation en littérature[27], la musique semble être encore une fois une entrée productive, comme on peut le voir dans les deux dernières parties du « Cercle des fragments » de Roland Barthes par Roland Barthes :

Quoi, lorsqu’on met des fragments à la suite, nulle organisation possible ? Si : le fragment est comme l’idée musicale d’un cycle (Bonne Chanson, Dichterliebe) : chaque pièce se suffit, et cependant elle n’est jamais que l’interstice de ses voisines : l’œuvre n’est faite que de hors-texte. L’homme qui a le mieux compris et pratiqué l’esthétique du fragment (avant Webern), c’est peut-être Schumann ; il appelait le fragment « intermezzo » ; il a multiplié dans ses œuvres les intermezzi : tout ce qu’il produisait était finalement intercalé : mais entre quoi et quoi ? Que veut dire une suite pure d’interruptions ?

Le fragment a son idéal : une haute condensation, non de pensée, ou de sagesse, ou de vérité (comme dans la Maxime), mais de musique : au « développement », s’opposerait le « ton », quelque chose d’articulé et chanté, une diction : là devrait régner le timbrePièces brèves de Webern : pas de cadence : quelle souveraineté il met à tourner court[28] !

Encore que le fragment soit une totalité en soi – n’oublions pas que ce sont des « pierres sur le pourtour du cercle[29] » – et qu’on puisse l’analyser par des ruptures de construction internes, quand il est nommé intermezzo, on voit en lui, au-delà de la seule pièce isolée, la relation qu’il établit avec la pièce qui précède et avec celle qui suit. Rappelons que l’intermezzo dans la tradition musicale est une pièce courte, sans forme particulière, placée entre deux parties d’une œuvre majeure et qui a pour but de distraire ou d’alléger l’œuvre dont il fait partie. C’est Schumann, dans Intermezzi (Opus 4), qui donne à ce mot un nouveau sens : composée de six pièces courtes pour piano, la structure de cette œuvre renouvelle la fonction de l’intermezzo dans l’ordre du développement musical[30]. La juxtaposition de pièces – et surtout d’interruptions – schumannienne est du même ordre que celle de Webern au XXe siècle : ce sont des œuvres où la rupture et la suspension ne sont plus exceptionnelles, mais deviennent la condition sine qua non de leur existence. Or, Barthes valorise justement ce « non vouloir-saisir » dans son écriture, cette non réponse. Si on lit attentivement le passage du premier au second fragment, dans la citation ci-dessus, on voit bien qu’aucune réponse n’est donnée à la question « que veut dire une suite pure d’interruptions ? » – ce qui probablement ne veut rien dire –, et que l’on entre, au contraire, dans une nouvelle variation sur le thème « qu’est-ce qu’un fragment pour moi ? ». Chez Barthes, l’écriture fragmentaire casse donc la possibilité du métalangage puisqu’elle ne donne aucune conclusion, aucun point final, sinon le silence, la réticence et l’accumulation de débuts. On est dans une dynamique presque tautologique des variations où « le  “contenu”  des formes importe moins que leur translation[31] ». Une variation continue sur différents thèmes abordés de manière non exhaustive, bien sûr, mais aussi une réinscription du sujet énonciateur : on retrouve réinvesti dans les « bouffées de langage[32] » « ce corps dans la voix qui chante, dans la main qui écrit, dans le membre qui exécute[33] ». On retrouve dans chaque début, la tentative d’inscription d’une différence.



La voix et le grain de Barthes


Considérée parfois par Barthes comme un mauvais thème, la voix me semble être une dernière entrée assez productive pour comprendre son écriture. Au centre même des entrées précédentes, elle incarne l’usage singulier d’un code – musical ou linguistique – qui met en scène le sujet producteur du chant ou de l’écriture. La voix est aussi la matière insaisissable de l’écriture. Elle est une partie, disons, réelle, du sujet qu’on essaie d’inscrire dans le texte ; mais, dès que le sujet essaie de « mettre sa voix par écrit », sa voix s’amuit à la fois au niveau de la matière sonore – parce que l’écriture enlève tout qu’il y a de melos[34] – et au niveau de l’image, étant donné que l’écriture est toujours le dédoublement d’une voix et que la voix écrite est déjà une autre voix que celle d’origine. C’est la même question qui hante La Chambre Claire, cette présence qui ne fait que signaler une absence : la photo du jardin d'hiver montre à la fois Henriette Barthes, qui est là en tant qu’image et la conscience que cette image au plan réel n'existe plus, que cette image ne correspond plus à aucun corps. La voix, cette métonymie du corps, va aussi mourir un jour et ce que l’on fait depuis toujours, désespérément, c’est de lutter contre son amuïssement dans l’oubli. Or, n’est -ce pas cela la littérature ? Une écoute des voix qui se réincarnent à chaque lecture ?

Les enregistrements sonores de Barthes – au Collège de France ou lors d’émissions radiophoniques – nous font vivre matériellement cette expérience : on écoute son timbre, ses silences, la cadence singulière qu’il a donné au discours, mais il s'agit d'une présence qui renvoie aussi à une absence. De plus en plus nombreux dans la décennie ici abordée – grâce à l’entrée au Collège et au succès des Fragments d’un discours amoureux –, ces enregistrements peuvent être relus à la lumière des idées de Barthes sur la production à haute voix. On connaît l’intérêt de Barthes pour ce sujet à partir de l’ « Atelier sur la Voix » du Lexique de l’auteur ; dans La Préparation du Roman on rencontre quelques références aux textes destinées à être lus pour un public, le dictare des auteurs latins, mais c’est dans les dernières pages du Plaisir du Texte qu’il a véritablement proposé une « écriture à haute voix », même si elle demeure très sommaire :

son objectif n’est pas la clarté des messages, le théâtre des émotions ; ce qu’elle cherche (dans une perspective de la jouissance), ce sont incidents pulsionnels, c'est le langage tapissé de peau, un texte où l'on puisse entendre le grain du gosier, la patine des consonnes, la volupté des voyelles, toute une stéréophonie de la chair profonde : l'articulation du corps, de la langue non celle du sens, du langage[35]

Cela posé, pourrait-on envisager les cours et les enregistrements sonores de Barthes comme une sorte d’écriture à haute voix ? Si Barthes réclamait l’oubli de l’actio de la rhétorique antique, si la lecture d’Artaud et de Sollers l’encourageait à une extériorisation de l’écriture, l’écriture à haute voix dans le cas de Barthes ne dépasse pas le stade de l’utopie. Une époque consciente des enregistrements sonores et de leur postériorité – pensons à Foucault au Collège de France ou encore aux mises en scènes de Lacan à la télévision – nous incite à lire La Préparation comme « le roman », l’enregistrement sur Proust comme la « tierce forme » ; cependant, l’importance que Barthes accordait à l’acte d’écriture et à sa propre façon d’écrire tous ses cours à la main nous prémunit contre cette tentation d’y voir une écriture enregistrée à voix haute. Il n’y a pas une écriture à haute voix chez Barthes, parce que le texte lu – les fiches, les notes de cours – est toujours là comme un scénario. On ne pourra donc pas prendre en compte l’aspect matériel de la voix de Barthes et on en reviendra à la voix en tant que métaphore.

Seule la métaphore peut dire la musique et les affects : selon Barthes, la voix et son grain ne sont pas indescriptibles, mais ils ne sont dicibles que par images. La voix de Barthes est mise en scène par une écriture qui fait bruire la langue, une écriture quasi parlando. L’écriture que Barthes tente de réaliser serait faite du bruit presque inaudible de la machine en parfait fonctionnement – et, pourtant, dans le champ du discours, cette machine ne peut être qu’une utopie[36] – de la langue étrangère entendue, mais non comprise, de la poésie potentielle qu’incarnerait la musique romantique non chantée ; il s’agit toujours d’un état utopique du langage, une écriture qui parle, mais qui ne dit rien. Barthes trouve tout cela dans la forme brève orientale qui « lutte pour s’arracher au sens, au vraisemblable, sans se détruire par la castration du sens[37] ». Le haïku – ou sa version barthésienne, l’ « incident » – apporte à la fois cette utopie d’une parole libre du sens et l’éclat du réel à partir d’une image.



Conclusion


La musique pour Barthes est la construction d’un espace imagé, plutôt qu’une temporalité : plus on essaie d’aller vers la musique chez Barthes, plus on retombe sur l’écriture qui se veut comme une suite d’images. Toujours dans « Rasch », on apprend que « la suite d’intermezzi n’a pas pour fonction de faire parler des contrastes, mais plutôt d’accomplir une écriture rayonnante, qui se retrouve alors bien plus proche de l’espace peint que de la chainée parlée[38] ». Comme son écriture, la musique est la jouissance graphique et l’accumulation des notations quotidiennes – comme on peut le voir dans les partitions reproduites dans Roland Barthes par Roland Barthes et « Rasch[39] » – et incarne l’envie extrême de faire parler un corps et ses affects sans pourtant rien dire.

Plan



Résumé

Cet article réunit quelques-unes des grandes idées de Barthes sur la musique pour montrer comment celle-ci, au-delà de l'intérêt thématique, se convertit en véritable modèle pour penser l'écriture.


Notes

[1]« Rasch » [1975], OC IV, p. 828.


[2]L’opposition entre le biologique du style et le social de la langue, dont l’écriture peut être lue comme une synthèse, est peut-être l’exemple le plus répandu en ce qui concerne cette dialectique : « Langue et style sont des forces aveugles ; l’écriture est un acte de solidarité historique. Langue et style sont des objets ; l’écriture est une fonction : elle est le rapport entre la création et la société, elle est le langage littéraire transformé par sa destination sociale, elle est la forme saisie dans son intention humaine et liée ainsi aux grandes crises de l’Histoire. » (Le degré zéro de l’écriture [1953], OC I, pp. 179-180.)


[3]Éric Marty, dans son livre Roland Barthes, le métier d’écrire, fait référence aux énoncés les plus extrêmes prononcés par la theoria comme à un discours qui vise moins à produire une image représentable qu’à briser « les synthèses passives constitutives du regard aliéné.» (in Roland Barthes, le métier d’écrire, Paris, Seuil, 2006, p. 205). Dans ce sens, l’assertion prononcée dans la leçon inaugurale « la langue est fasciste » ne vise pas à militer pour une liberté d’expression, disons, hors code, mais à changer notre regard aliéné sur le code, pour montrer que la littérature est un usage non passif des prescriptions et des habitudes linguistiques d’une époque et donc un « coup » qui déjoue le « code ».


[4]Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 671.


[5]La Préparation du roman I et II. Notes de cours et de séminaires au Collège de France, 1978-1979 et 1979-1980, Paris, Seuil / Imec, coll. « Traces écrites », 2003, p. 321.


[6]Ibid., p. 384


[7]Dans Le Lexique de l’auteur (Le lexique de l’Auteur. Séminaire à l’École pratique des hautes études (1973-1974). Paris, Seuil, « Collection Traces écrites », 2010), au début de la séance du 8 novembre 1973, Barthes prête au « Séminaire » le statut d’une expérience plutôt que celui d'une catégorie institutionnelle. Pour ne pas retomber dans une « simple visée impressionniste de la confidence », il use du mot « expérience » en se fondant sur le débat nietzschéen contre les valeurs de la Vérité et de la Science. Notons que l'appropriation barthésienne du concept musical d'interprétation peut aussi servir à l’étude de l’œuvre nietzschéenne, étant donné que le philosophe était également pianiste et compositeur (Cf. François Noudelmann, Le toucher des philosophes, Paris, Gallimard, 2008).


[8]Lorsqu’on lit la partition, on finit par se conformer aux notations existantes, relevant généralement de l’urpartituren, c’est-à-dire d’un idéal interprétatif, tandis que lorsqu’on apprend un morceau par cœur, on est plus libre pour l’interpréter.


[9]« Écrire la lecture» [1970], OC III, p. 602.


[10]C’est la dynamique de lecture qui a été élevée au dernier degré dans S/Z, mais qui est présente un peu partout dans son œuvre.


[11] « Aimer Schumann » [1979], OC V, p. 722.


[12]La Préparation du roman I et II. Notes de cours et de séminaires au Collège de France, 1978-1979 et 1979-1980, Paris, Seuil / Imec, coll. « Traces écrites », 2003, p. 321.


[13]Emile Benveniste, « Sémiologie de la langue » [1969], in Problèmes de linguistique général II, Paris, Gallimard, Coll. « Tel », 1997, p. 51.


[14]« […] pris en soi, comme objectivité réelle, le son, contrairement à la matière des arts plastiques, est de nature abstraite. À l’aide de la pierre et de la couleur, on peut reproduire les formes des objets les plus variés, tels qu’ils existent dans la réalité ; avec les sons, c’est impossible. Seule l’intériorité sans objet, la subjectivité abstraite se laisse exprimer par les sons. Subjectivité abstraite qui est un moi entièrement vide, sans autre contenu. La tâche principale de la musique consiste donc, non à reproduire les objets réels, mais à faire résonner le moi le plus intime » (in G.W.F. Hegel, Esthétique. La Peinture. La Musique [Traduction : Samuel Jankélevitch], Paris, Aubier-Montaigne, Coll. « Philosophie en poche», 1965, p. 159-160.


[15]« Rasch » [1975], OC IV, p. 830.


[16]Ibid., p. 838.


[17]Ibid., p. 835.


[18]Encore une fois, S/Z est à ce titre un texte exemplaire, celui qui met en scène la "rupture" comme une valeur de la lecture barthésienne.


[19]« Rasch » [1975], OC IV, p. 836.


[20]Le Plaisir du Texte [1973], OC IV, p. 223.


[21]Ibid., p. 222.


[22]Ibid., p. 223.


[23]Idem.


[24]Comme le souligne Éric Marty, on ne peut pas à proprement parler d’une théorie du fragment chez Barthes (Roland Barthes, le métier d’écrire, op. cit., p. 255.)


[25]Idem.


[26]Dans « Le fragment comme illusion » Barthes dénonce la naïveté de cet outil, qui ne garantit aucune forme d’exemption contre la bêtise : « le fragment […] est finalement un genre rhétorique et que la rhétorique est cette couche-là du langage qui s’offre le mieux à l’interprétation, en croyant me disperser, je ne fais que regagner sagement le lit de l’imaginaire. » (Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 672) Pourtant, il me semble que la conscience critique du paradoxe existant dans la performance technique du fragment fait de cet outil une façon de déjouer le couple de la cause et de la conséquence propre à la pensée occidentale.


[27]« On notera que le fragment chez Barthes n’est ni celui d’Héraclite, jeu de l’obscur et de l’éclat, ni celui de Nietzsche, l’aphorisme, la violence, ni celui du romantisme, esthétique de la ruine, du carnaval mélancolique, ni celui de La Rochefoucauld, maxime et sévérité. » (Éric Marty, Roland Barthes, le métier d’écrire, op. cit., p. 255) Il ne semble pas non plus que soit Pascal son modèle, ni même La Bruyère. Plus qu’un genre, la fragmentation semble être un outil rhétorique de suspension du sens dans le texte.


[28]Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 671.


[29]Ibid., p.670.


[30]Au début du XXe siècle, Richard Strauss compose aussi un opéra en deux actes nommé Intermezzo.


[31]Le Neutre. Cours au Collège de France (1977-1978), Paris, Seuil, « Collection Traces écrites », 2002., p. 35.


[32]Fragments d’un discours amoureux [1977], OC V, p. 29.


[33]« Le grain de la voix » [1972], OC V, p. 155.


[34]La ponctuation est une tentative de restituer ce melos, mais en tant que code elle refoule déjà le sujet.


[35]Le Plaisir du Texte [1973], OC IV, p. 261.


[36]« Une machine (érotique) peut bruire. Mais le langage ? C’est l’éternelle aporie : le langage n’est pas un bruit, il a structuralement du sens, il est condamné au sens. » (Le Lexique de l'auteur, op. cit., p. 201)


[37]Le lexique de l’Auteur, op. cit., p. 201.


[38]« Rasch » [1975], OC IV, p. 828.


[39]Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 636 ; « Rasch » [1975], OC IV, p. 829. 


Auteur

Juliana Bratfisch est étudiante en Master à l'Université de São Paulo où elle développe une recherche intitulée « Le Monstre de la Totalité : Politiques du fragment chez Roland Barthes », sous la direction de Verónica Galíndez-Jorge, financée par la FAPESP.

Pour citer cet article

Juliana Bratfisch, « "L’envie de l’intermezzo" : une métaphore pour l’écriture barthésienne », Revue Roland Barthes, nº 1, juin 2014 [en ligne]. URL : http://www.roland-barthes.org/article_bratfisch.html [Site consulté le DATE].


1« Rasch » [1975], OC IV, p. 828.

2L’opposition entre le biologique du style et le social de la langue, dont l’écriture peut être lue comme une synthèse, est peut-être l’exemple le plus répandu en ce qui concerne cette dialectique : « Langue et style sont des forces aveugles ; l’écriture est un acte de solidarité historique. Langue et style sont des objets ; l’écriture est une fonction : elle est le rapport entre la création et la société, elle est le langage littéraire transformé par sa destination sociale, elle est la forme saisie dans son intention humaine et liée ainsi aux grandes crises de l’Histoire. » (Le degré zéro de l’écriture [1953], OC I, pp. 179-180.)

3Éric Marty, dans son livre Roland Barthes, le métier d’écrire, fait référence aux énoncés les plus extrêmes prononcés par la theoria comme à un discours qui vise moins à produire une image représentable qu’à briser « les synthèses passives constitutives du regard aliéné.» (in Roland Barthes, le métier d’écrire, Paris, Seuil, 2006, p. 205). Dans ce sens, l’assertion prononcée dans la leçon inaugurale « la langue est fasciste » ne vise pas à militer pour une liberté d’expression, disons, hors code, mais à changer notre regard aliéné sur le code, pour montrer que la littérature est un usage non passif des prescriptions et des habitudes linguistiques d’une époque et donc un « coup » qui déjoue le « code ».

4Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 671.

5La Préparation du roman I et II. Notes de cours et de séminaires au Collège de France, 1978-1979 et 1979-1980, Paris, Seuil / Imec, coll. « Traces écrites », 2003, p. 321.

6Ibid., p. 384.

7Dans Le Lexique de l’auteur (Le lexique de l’Auteur. Séminaire à l’École pratique des hautes études (1973-1974). Paris, Seuil, « Collection Traces écrites », 2010), au début de la séance du 8 novembre 1973, Barthes prête au « Séminaire » le statut d’une expérience plutôt que celui d'une catégorie institutionnelle. Pour ne pas retomber dans une « simple visée impressionniste de la confidence », il use du mot « expérience » en se fondant sur le débat nietzschéen contre les valeurs de la Vérité et de la Science. Notons que l'appropriation barthésienne du concept musical d'interprétation peut aussi servir à l’étude de l’œuvre nietzschéenne, étant donné que le philosophe était également pianiste et compositeur (Cf. François Noudelmann, Le toucher des philosophes, Paris, Gallimard, 2008).

8Lorsqu’on lit la partition, on finit par se conformer aux notations existantes, relevant généralement de l’urpartituren, c’est-à-dire d’un idéal interprétatif, tandis que lorsqu’on apprend un morceau par cœur, on est plus libre pour l’interpréter.

9« Écrire la lecture» [1970], OC III, p. 602.

10C’est la dynamique de lecture qui a été élevée au dernier degré dans S/Z, mais qui est présente un peu partout dans son œuvre.

11« Aimer Schumann » [1979], OC V, p. 722.

12La Préparation du roman I et II. Notes de cours et de séminaires au Collège de France, 1978-1979 et 1979-1980, Paris, Seuil / Imec, coll. « Traces écrites », 2003, p. 321.

13Emile Benveniste, « Sémiologie de la langue » [1969], in Problèmes de linguistique général II, Paris, Gallimard, Coll. « Tel », 1997, p. 51.

14« […] pris en soi, comme objectivité réelle, le son, contrairement à la matière des arts plastiques, est de nature abstraite. À l’aide de la pierre et de la couleur, on peut reproduire les formes des objets les plus variés, tels qu’ils existent dans la réalité ; avec les sons, c’est impossible. Seule l’intériorité sans objet, la subjectivité abstraite se laisse exprimer par les sons. Subjectivité abstraite qui est un moi entièrement vide, sans autre contenu. La tâche principale de la musique consiste donc, non à reproduire les objets réels, mais à faire résonner le moi le plus intime » (in G.W.F. Hegel, Esthétique. La Peinture. La Musique [Traduction : Samuel Jankélevitch], Paris, Aubier-Montaigne, Coll. « Philosophie en poche», 1965, p. 159-160.

15« Rasch » [1975], OC IV, p. 830.

16Ibid., p. 838.

17Ibid., p. 835.

18Encore une fois, S/Z est à ce titre un texte exemplaire, celui qui met en scène la "rupture" comme une valeur de la lecture barthésienne.

19« Rasch » [1975], OC IV, p. 836.

20Le Plaisir du Texte [1973], OC IV, p. 223.

21Ibid., p. 222.

22Ibid., p. 223.

23Idem.

24Comme le souligne Éric Marty, on ne peut pas à proprement parler d’une théorie du fragment chez Barthes (Roland Barthes, le métier d’écrire, op. cit., p. 255.)

25Idem.

26Dans « Le fragment comme illusion » Barthes dénonce la naïveté de cet outil, qui ne garantit aucune forme d’exemption contre la bêtise : « le fragment […] est finalement un genre rhétorique et que la rhétorique est cette couche-là du langage qui s’offre le mieux à l’interprétation, en croyant me disperser, je ne fais que regagner sagement le lit de l’imaginaire. » (Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 672) Pourtant, il me semble que la conscience critique du paradoxe existant dans la performance technique du fragment fait de cet outil une façon de déjouer le couple de la cause et de la conséquence propre à la pensée occidentale.

27« On notera que le fragment chez Barthes n’est ni celui d’Héraclite, jeu de l’obscur et de l’éclat, ni celui de Nietzsche, l’aphorisme, la violence, ni celui du romantisme, esthétique de la ruine, du carnaval mélancolique, ni celui de La Rochefoucauld, maxime et sévérité. » (Éric Marty, Roland Barthes, le métier d’écrire, op. cit., p. 255) Il ne semble pas non plus que soit Pascal son modèle, ni même La Bruyère. Plus qu’un genre, la fragmentation semble être un outil rhétorique de suspension du sens dans le texte.

28Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 671.

29Ibid., p.670.

30Au début du XXe siècle, Richard Strauss compose aussi un opéra en deux actes nommé Intermezzo.

31Le Neutre. Cours au Collège de France (1977-1978), Paris, Seuil, « Collection Traces écrites », 2002., p. 35.

32Fragments d’un discours amoureux [1977], OC V, p. 29.

33« Le grain de la voix » [1972], OC V, p. 155.

34La ponctuation est une tentative de restituer ce melos, mais en tant que code elle refoule déjà le sujet.

35Le Plaisir du Texte [1973], OC IV, p. 261.

36« Une machine (érotique) peut bruire. Mais le langage ? C’est l’éternelle aporie : le langage n’est pas un bruit, il a structuralement du sens, il est condamné au sens. » (Le Lexique de l'auteur, op. cit., p. 201)

37Le lexique de l’Auteur, op. cit., p. 201.

38« Rasch » [1975], OC IV, p. 828.

39Roland Barthes par Roland Barthes [1975], OC IV, p. 636 ; « Rasch » [1975], OC IV, p. 829.