Revue

Roland

Barthes





n°2 - Barthes à l'étranger > octobre 2015




Claude Coste & Mathieu Messager

Avant-propos


Depuis l’année universitaire 2010-2011, un séminaire consacré à l’œuvre et à la pensée de Roland Barthes se tient à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm à Paris. Organisé dans le cadre de l’ITEM-CNRS, en collaboration avec les universités de Paris Diderot et de Grenoble Alpes, ce séminaire programmé par Claude Coste et Éric Marty (rejoints en 2013 par Marie Gil), se donne pour mission de rendre compte de l’actualité éditoriale barthésienne (publications d’inédits, traductions, commentaires), de proposer des communications sur les sujets les plus libres et de constituer un lieu d’échanges entre chercheurs de toutes origines. Contrairement à d’autres penseurs des années 60 à 80, la quasi-totalité des archives de Barthes est conservée en France ; d’abord déposées à l’IMEC et valorisées par Nathalie Léger, elles sont maintenant consultables à la Bibliothèque Nationale de France sous la responsabilité de Marie-Odile Germain. La concentration des archives à Paris favorise le développement d’une recherche française sur les manuscrits, les brouillons, les avant textes ; cet intérêt pour la génétique, au sens le plus large du terme, s’est en particulier traduit par la publication, sous la direction générale d’Éric Marty, de nombreux inédits, qu’il s’agisse des cours et séminaires au Collège de France (Comment vivre ensemble, Le Neutre, La Préparation du roman), à l’École pratique des hautes études (Le Lexique d’auteur, Sarrasine de Balzac) ou de lettres recueillies en 2015 dans le volume Album, aux éditions du Seuil. Par ses activités de professeur enfin, Barthes a rencontré et souvent inspiré un grand nombre des intellectuels dont l’influence s’exercera au tournant des XXe et XXIe siècles. C’est dire l’importance et la spécificité d’une réception française marquée par la proximité avec l’homme autant qu’avec l’œuvre : sans jamais connaître le purgatoire, les livres de Barthes, des Mythologies et du Degré zéro de l’écriture aux Fragments d’un discours amoureux et à La Chambre claire, ont profondément marqué plusieurs générations de lecteurs qui n’ont cessé de rendre hommage à un maître aussi singulier.

Le séminaire se devait naturellement de donner la parole à cette génération « qui a connu Barthes » et dont l’expérience vaut à la fois comme témoignage sur la vie intellectuelle d’hier et comme stimulant pour la réflexion aujourd’hui. Mais pour les organisateurs du séminaire, il s’agissait tout autant d’ouvrir le champ de la recherche au-delà d’une seule époque (les années 60-70) et d’une seule culture (la France). En accueillant des collègues venus d’universités étrangères (Emily Apter, Thomas Baldwin, Kate Briggs, Ottmar Ette, Diana Knight, Kohei Kuwada, Alexandru Mattei, Maria O’Sullivan, Andy Stafford, Thomas Vercruysse…), en donnant la parole aux jeunes docteurs ou doctorants travaillant tout ou partie sur l’œuvre de Barthes (une journée d’études a été organisée en 2013), le séminaire se veut un lieu fédérateur pour l’ensemble des critiques, des traducteurs ou des amateurs pour lesquels l’œuvre de Barthes est un objet d’étude et de passion. La création du site www.roland-barthes.org en 2013 (sous la responsabilité de Mathieu Messager) est venue donner une plus grande visibilité et une plus grande ampleur à la confrontation de toutes ces approches critiques.

« Barthes à l’étranger » : le 18 juin 2011, à l’École Normale Supérieure, s’est tenue une journée d’études organisée dans le cadre du séminaire de l’Item-CNRS. Il s’agissait de réunir un ensemble de chercheurs étrangers venus présenter l’état des travaux en Europe, en Asie ou en Amérique du Nord. Les articles qu’on va lire sont les traces de cette journée dont le principal élément fédérateur réside dans la nouveauté par rapport à la lecture française de Barthes[1]. Barthes à l’étranger ? Sans doute par le nombre des nationalités représentées : Brésil et Portugal (Claudia Amigo Pino, Laura Brandini, Leda Tenorio da Motta), Chine (Han Qian), Espagne (Ester Pino, Angeles Sirvent), États-Unis (Yue Zhuo), Italie (Guido Mattia Gallerani), Maroc (Khalid Lyamlahy), Pologne (Magdalena Marciniak), Royaume-Uni (Lucy O’Meara)… Ou tout autant Barthes et l’étranger, si l’on envisage les communications qui s’interrogent sur les relations de Barthes avec les cultures ou les regards venus d’ailleurs : le monde arabe (Ridha Boulaâbi, Claude Coste), le Japon (avec le haïku dont Khalid Lyamlahy analyse la présence dans La Préparation du roman) ou Julia Kristeva (« l’étrangère » dont Magdalena Marciniak montre l’importance capitale). Témoignages d’un séminaire idiorrythmique qui respecte la singularité de chacun dans le débat collectif, les articles recueillis dans ce numéro se retrouvent autour d’une même attitude à la fois chaleureuse et distanciée à l’égard d’une œuvre dont la présence transcende les frontières. En cette année du centenaire, la multiplication des rencontres et des colloques en France et à l’étranger manifeste, au-delà des différences et des singularités, la vitalité d’un même lire ensemble[2].


Résumé

Avant-propos au numéro 2 de la Revue Roland Barthes.


Notes

[1] Ce numéro de la la Revue Roland Barthes ne constitue pas à proprement parler les actes de cette journée d'études ; ainsi, à l'exception des communications de Lucy O'Meara, Han Qian et Yue Zhuo données ce jour-là, les articles ici réunis nous ont été confiés par les soins de barthésiens soucieux de s'inscrire dans le prolongement de ce "Barthes à l'étranger".

[2] Nous tenons ici à remercier l'ensemble des collaborateurs de la revue pour leur travail - dévoué et précieux - de relecture et d'édition des textes : Adrien Chassain, Charles Coustille, Lise Forment, Francesca Mambelli, Ester Pino Estivill ; à cette équipe se sont jointes Fanny Lorent et Cécile Raulet que nous accueillons avec un grand plaisir.


Auteur

Claude Coste, professeur à l’université de Grenoble Alpes, consacre une grande partie de sa recherche à l'œuvre de Roland Barthes. Il va faire paraître à la fin de l'année 2015 Roland Barthes ou l’art du détour

Mathieu Messager est professeur de lettres modernes, chargé de cours à l'Université Paris 13. Il termine une thèse de doctorat sous la direction de Bruno Blanckeman (Paris 3 - Sorbonne nouvelle) qui porte sur "Les formes hétérodoxes de l'écriture savante (Roland Barthes, Pascal Quignard)". Il s'intéresse plus précisément aux chevauchements des registres fictionnel et essayistique. Co-directeur de la Revue Roland Barthes, il est aussi le concepteur et le développeur du site roland-barthes.org

Pour citer cet article

Claude Coste & Mathieu Messager, « Avant-propos », Revue Roland Barthes, nº 2, « Barthes à l'étranger », octobre 2015 [en ligne]. URL : http://www.roland-barthes.org/intro_revue_2.html [Site consulté le DATE].


1 Ce numéro de la la Revue Roland Barthes ne constitue pas à proprement parler les actes de cette journée d'études ; ainsi, à l'exception des communications de Lucy O'Meara, Han Qian et Yue Zhuo données ce jour-là, les articles ici réunis nous ont été confiés par les soins de barthésiens soucieux de s'inscrire dans le prolongement de ce "Barthes à l'étranger".

2 Nous tenons ici à remercier l'ensemble des collaborateurs de la revue pour leur travail - dévoué et précieux - de relecture et d'édition des textes : Adrien Chassain, Charles Coustille, Lise Forment, Francesca Mambelli, Ester Pino Estivill ; à cette équipe se sont jointes Fanny Lorent et Cécile Raulet que nous accueillons avec un grand plaisir.